Les beaux
Publié le 26 Septembre 2021
"Les beaux", une pièce de Léonore Confino, est à l'affiche du théâtre Le Public jusqu'à la fin du mois d'octobre, et je vous recommande d'aller la voir!
J'ai découvert la plume particulière de Léonore Confino grâce au spectacle "Le poisson belge", vu il y a 5 ans. J'avais adoré le mélange poésie / trash / humour noir / émotion et les différents niveaux de lecture de l'intrigue (qui mettait en scène "Grande Monsieur" et "Petit fille", déjà étrange en soi...). Et pour être honnête, en lisant le résumé de ces "beaux" dans le pré-programme du Public, j'avais d'abord pensé que c'était "encore une pièce sur le couple et ses difficultés, ses crises", et j'ai failli passer à côté... jusqu'à ce que je repère le nom de l'auteur et que je me dise "Stop, alors ça vaudra sûrement le détour!".
Mon intuition était bonne: ce spectacle vaut le détour. L'histoire semble assez classique. Un couple. Ils sont beaux, ils le disent eux-mêmes, ils s'aiment et tout va bien. Un vrai conte de fées façon Barbie et Ken... D'ailleurs... ne serait-ce pas les poupées de Mattel, finalement, ce couple? Et ces cris qu'on entend par moments et qui donnent une vision moins idyllique de la réalité, ils viennent d'où? Puisque c'est annoncé dans le résumé, je ne vous en dévoilerai pas trop en vous disant que la première manière dont on découvre le couple, c'est à travers l'imagination de leur petite fille, qui préfère s'inventer une autre réalité plutôt que de supporter les disputes incessantes de ses parents... Qui sont loin d'être beaux ou parfaits. Mais s'aiment-ils encore? Ils vont peut-être le découvrir au bout d'une nuit qu'un événement inattendu va perturber, ouvrant la voie à une discussion sans fard entre eux.
Oui, le sujet de la pièce, c'est bien le couple, la relation, la vie de famille aussi. Avec ses non-dits, ses mensonges, ses secrets, ses rancunes, ses lâchetés, ses apparences. Mais la façon d'aborder ces thèmes est originale, l'angle choisi et la manière dont les échanges évoluent entre cette femme un brin hystérique qui menace régulièrement de se suicider et cet homme angoissé qui ne tient plus qu'à un fil, sont différents de ce qu'on voit la plupart du temps. L'écriture de Léonore Confino est brillante (la comparaison entre la vie rêvée par la petite fille et la réalité est très drôle, notamment concernant la profession du papa...). Les dialogues sonnent juste tout en frôlant l'absurde, on rit énormément alors ils s'en balancent à la tronche sans prendre de pincettes, c'est totalement jubilatoire!
J'ignore si le texte de la pièce comporte des didascalies précises, mais je soupçonne la mise en scène d'Eric de Staercke d'en rajouter une couche au niveau de l'absurde et du décalage! Ce qui permet d'avoir un recul suffisant pour rire (alors qu'au fond, les protagonistes échangent des horreurs et la situation n'est pas vraiment drôle), sans pour autant perdre de vue le fond du propos... Cette pièce offrirait-elle une thérapie de couple par le rire? Ce qui est sûr, c'est que la mise en scène est très rythmée, que l'on est embarqué dans l'histoire, et que le kitsch, l'absurde sont poussés à l'extrême sans jamais tomber dans le grotesque ni le "too much" (chapeau pour ça!).
Rien à redire sur la performance des comédiens: Ariane Rousseau et Fabio Zenoni sont parfaits! Ils parviennent à faire passer une sincérité et une spontanéité qui donne l'impression que certaines scènes sont de l'impro tellement tout est naturel. En plus, ils rendent leurs personnages attachants malgré leur cruauté et leurs erreurs.
En résumé, "Les beaux" est une comédie romantique (ou pas!!) intelligente et originale, assez déjantée de prime abord mais avec du fond et plusieurs niveaux de lecture (même si c'est moins psychanalytique que "le poisson belge"), portée par une belle distribution et une jolie mise en scène. De quoi passer un bon moment, alors ne le ratez pas!
Infos et réservations sur le site du théâtre Le Public.