Animal farm

Publié le 13 Novembre 2022

Adapter le (court) roman de George Orwell, "la ferme des animaux", en spectacle musical... sacré pari, non? D'ailleurs j'avoue que quand j'ai réservé ma place, je n'avais pas vu que c'était un spectacle musical, sinon j'aurais probablement hésité, tant cela me paraissait... impossible, antinomique, trop léger, trop décalé.
Eh bien, j'aurais eu tort, et heureusement que je ne suis pas passée à côté de ce spectacle, car j'ai trouvé le pari très réussi!

Sans doute moins connue que "1984", "La ferme des animaux" n'en est pas moins glaçante pour autant... Sauf qu'ici, l'histoire ne se passe pas chez les humains, mais chez les animaux. Dans la ferme de Mr Jones, les animaux en ont marre d'être maltraités, exploités, et de finir à l’abattoir! Alors, réunis autour de Sage l'Ancien, un vieux cochon, ils vont s'unir et s'organiser pour prendre le contrôle de la ferme et chasser le fermier! Et établir une société libre où tous les animaux sont égaux, autour des 7 commandements de Sage l'Ancien. Seulement voilà, comme son nom l'indique, Sage l'Ancien n'en a plus pour longtemps.... Qu'adviendra-t-il de ses beaux préceptes après sa mort? En tout cas, très vite, les cochons vont prendre les choses en main et se poser en dirigeants, pour le bien-être de toute la communauté, évidemment. Ils vont s'octroyer des privilèges, c'est normal, ils ont toutes les responsabilités. Et petit à petit, la situation va s'assombrir...

Thierry Debroux adapte cette histoire en la truffant de chansons et de danses. On n'est pas dans une comédie musicale quand même, il y a de nombreux échanges non chantés (on est plus dans la proportion chants/scènes de théâtre de l'Opéra de quat'sous de Brecht que de Notre-Dame de Paris en comédie musicale version Plamondon, pour vous donner une idée). Mais, curieusement, alors que je ne suis pas fan des spectacles musicaux en général (sauf le Brecht que je viens de citer), cela ne m'a pas dérangée. Les chansons et chorégraphies allègent un peu le ton, mais cela n'altère pas le fond de l'histoire. Ca rend juste l'ensemble un peu moins angoissant que ne l'était l'adaptation de 1984 présentée au Parc il y a quelques années, et au fond ce n'est pas plus mal. Ces moments apportent des respirations sans ralentir le rythme global de l'histoire.
Les musiques ont été composées par Laurent Beumier, et elles m'ont beaucoup plu! C'est assez varié, j'ai pensé aux Oompa Loompa du film de Burton, "Charlie et la chocolaterie", au début, puis à Starmania (pas forcément pour le genre des chansons, mais au fond, César le cochon ou Zéro Janvier... même combat totalitaire, non?). Les chorégraphies sont signées Emmanuelle Lamberts, également co-metteure en scène avec Thierry Debroux (et on la retrouve aussi sur scène en plus!).

Et grâce à eux et à tous les autres, on passe une soirée agréable, le spectacle est sans temps mort, les costumes d'animaux sont superbement réalisés (bravo à l'équipe!), et les artistes complets (comédiens/chanteurs/danseurs) sont épatants! Je pourrais tous les citer, aucun n'est en-dessous, mais je soulignerai en particulier les performances sans failles des Pion père et fils, Guy et David (quel plaisir de les revoir ensemble sur scène, cela faisait longtemps, en plus leurs personnages sont particulièrement complices. Oui, bon, et retors aussi....). Et la magnifique voix de Fabian Finkels (Boule-de-Neige, cochon rebelle), dont je savais qu'il était aussi chanteur mais dont je n'avais jusqu'à présent apprécié que le talent de comédien, m'a charmée. J'ai beaucoup aimé Hélène Philippe en Molly aussi, elle a aussi une jolie voix, dommage que le personnage disparaisse un peu vite. Bref, une distribution à la hauteur de ce spectacle musical et théâtral!

Le théâtre du Parc annonce qu'Animal farm est accessible à partir de 8 ans. Et effectivement, il y a 2 niveaux de lecture qui permettent aux enfants de ne pas s'ennuyer. Les plus jeunes s'amuseront des chansons, des chorégraphies et des déguisements d'animaux. Et les plus grands se diront que cette fable animalière n'a décidément pas pris une ride... Elle montre comment un régime totalitaire/dictatorial se met petit à petit en place, en répandant des rumeurs et en escamotant en douce les opposants, avec l'aide du corbeau qui parle d'un au-delà merveilleux, histoire de donner du sens à l'après et de supporter les privations maintenant. Avec aussi la complicité du peuple, abruti de travail "pour son bien", donc incapable de prendre du recul (si César le dit, c'est que c'est vrai...).
Oh, mais n'ayez crainte, ce sont des cochons... ne les jugez pas, comme le dit Guy Pion au début, ils sont juste des animaux... génétiquement très proches de l'humain...

La pièce se joue jusqu'au 10/12, mais il ne reste plus énormément de places, alors foncez pour ne pas rater ce moment de théâtre original et inattendu sur la forme, très actuel sur le fond. Infos et réservations sur le site du Parc.

Rédigé par Emelle

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